
DISPOSITIF d'accueil de JOUR MACADAM :
RENCONTRE AVEC FANNY LAURENT, CHARGÉE DU TRAVAIL SOCIAL COMMUNAUTAIRE
Depuis juillet 2018, “Le Forum – Bruxelles contre les inégalités” mène avec l’aide de six partenaires, dont Abaka, un projet autour des jeunes en errance, c’est-à-dire des mineurs et des jeunes majeurs dont la prise en charge institutionnelle est rendue complexe par la présence de plusieurs problématiques (santé mentale, handicap, toxicomanie, errance, sans-abrisme, etc.). Le projet s’axe autour des difficultés que peuvent rencontrer ces jeunes dans des moments de transition (passage à la majorité, changement de lieu de vie, mise en autonomie). Fin 2020, les partenaires du Réseau jeunes en errance fondent l’asbl « Macadam – Réseau intersectoriel des jeunes en errance » avec comme première mission de créer un dispositif d’accueil de jour répondant aux besoins spécifiques de ces jeunes qui trop souvent, passent sous les radars, ne se retrouvent nulle part ou cherchent de l’aide au mauvais endroit pour finalement ne jamais arriver là où ils sont redirigés.
À l’approche de l’ouverture du dispositif d’accueil de jour de Macadam en juin prochain à quelques pas de la Gare du Midi, nous avons rencontré Eric Fairier, directeur d’Abaka qui est partenaire du réseau jeunes en errance, membre fondateur et administateur de Macadam et Fanny Laurent, chargée du travail social communautaire de Macadam asbl.
Comment s’est concrétisé ce projet ? Eric Fairier : En association avec des services du secteur sans-abrisme et de la santé mentale, l’équipe d’Abaka a réfléchi durant 2 ans à un endroit permettant un réaccrochage social pour ces jeunes. Inédit en son genre, ce centre de jour sera une porte d’entrée, un lieu pensé par et pour les jeunes de moins de 26 ans qui se retrouvent à la rue sans filet de sécurité.
Macadam, c’est quoi ? Fanny Laurent : C’est un centre de jour qui réunira les différents acteurs de terrain (aide à la jeunesse, sans-abrisme, santé mentale, lutte contre la pauvreté,…) pour offrir un accueil de qualité qui réponde aux besoins spécifiques des jeunes en errance. Un endroit où ils peuvent se poser, manger, se laver, se réchauffer, se reposer, … sans enjeux, et qui sera à la base du lien de confiance que l’on va créer. Une fois qu’ils ont la sérénité, le repos et la confiance en eux suffisante, l’idée est de laisser leurs demandes émerger et de chercher ensemble des solutions à leurs problèmes ou comment les réorienter au mieux.
Quelle est la plus-value du projet ? E.F : La plus-value du projet repose sur son réseau et le fait que ce dernier devienne très actif au sein et en dehors du dispositif. L’idée est d’endiguer le morcèlement de l’aide sociale en offrant les ressources nécessaires au sein d’un même lieu. Abaka a toujours cherché à investir des lieux où la complémentarité des offres des services est accessible aux jeunes. Ce projet s’inscrit dans la continuité de notre volonté d’innover et d’agir dans un secteur figé face à ses responsabilités. C’est un challenge que l’on a envie de relever, car nous sommes convaincus de sa pertinence.
Vous mentionnez l’ouverture, comment va t-elle se dérouler ?
F.L : Ce sera progressif. Au début, nous accueillerons les jeunes quelques demi-journées par semaine avec l’objectif d’offrir un accueil de qualité, une première écoute, l’accès à un café, un repas, une douche. L’espace laverie et les casiers seront opérationnels ainsi que l’espace de repos. À cela s’ajoute un espace de vie avec des jeux où les jeunes peuvent discuter entre eux et avec les travailleurs. Nous allons commencer avec un service réduit et petit à petit offrir une palette plus complète.

Comment allez-vous enrichir l’offre ?
F.L : Elle va se construire au travers des partenariats qui vont se nouer sur le terrain. L’idée de ce dispositif est que les partenaires puissent détacher leur équipe et proposer différents types d’activités, que ce soit des permanences pour faire connaître leur service et leurs activités ou rencontrer des jeunes qu’ils ne rencontrent pas chez eux. Mais aussi proposer des activités chez Macadam qu’ils ne peuvent pas réaliser au sein de leurs murs pour diverses raisons.
Quelle sera la contribution d’Abaka ?
E.F : Depuis plus de deux ans déjà, nous contribuons à la mise en place du projet à travers de nombreux temps d’échange et des évènements qui ont permis d’identifier les ressources manquantes face à la problématique de l’errance des jeunes. Étant fondateur et administrateur de l’asbl, Abaka continuera d’investir le lieu à travers des heures dévolues à des permanences permettant de faire connaître et donner accès à notre service. Le cabinet Glatigny nous soutient dans cette démarche et nous a octroyé à cet effet un renfort pour nous permettre d’allouer du temps humain à la construction de ce réseau intersectoriel.
Les jeunes aussi ont une place dans l’élaboration du projet ?
F.L : En effet, les jeunes seront également moteurs du dispositif. C’est un espace où ils peuvent se poser, mais aussi en fonction de leurs envies proposer des initiatives, participer à la vie du lieu et créer des liens avec des travailleurs qui viennent d’ailleurs. L’objectif étant qu’ils aient une meilleure connaissance de l’offre qui existe et qu’ils soient plus en confiance d’aller chercher l’aide où elle se trouve.
Quel est le futur de Macadam ?
F.L : Idéalement Macadam ne veut pas devenir un dispositif indépendant qui tourne en cercle fermé mais un dispositif mis à disposition d’autres structures. Notre but est d’être en interaction avec le tissu associatif bruxellois déjà très dense et de créer des synergies au sein de celui-ci, favorisant ainsi la collaboration entre les associations, l’émergence de nouvelles méthodes de travail et pourquoi pas, de nouveaux projets.
Tout cela, en gardant en point de mire l’objectif de mettre fin au sans-abrisme jeune ?
E.F : Macadam a l’ambition claire d’apporter une réponse à l’errance des jeunes, car pour le moment ils font face à un vide institutionnel. Au-delà de l’accueil classique qui répond aux besoins vitaux, cet espace proposera « un corridor de services », c’est la proposition innovante du projet. Le lieu sera habité par un réseau d’associations qui mettront leurs compétences et leur savoir au profit des jeunes. L’offre de service de Macadam se veut intersectorielle afin d’offrir un accompagnement plus global et pertinent à ces jeunes aux situations complexes.
F.L : Nous avons aussi comme objectif en collaboration avec Bruxelles, d’arriver à une meilleure connaissance de l’errance des jeunes. Ce diagnostic est un défi qui va prendre des années mais dont la réflexion est amorcée au sein de la coalition Away Home, un réseau intersectoriel bi-communautaire qui rassemble des acteurs et plateformes qui travaillent la question des jeunes en errance et dont l’objectif est de mettre sur pied un plan d’action pour mettre fin au sans-abrisme des jeunes à Bruxelles.